Les ventes de Tesla chutent de 40 % en Europe tandis que BYD prend la tête
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En juillet dernier, un vent de changement a soufflé sur le marché automobile européen. Un vent discret, mais puissant. Un vent qui, cette fois, ne vient pas des usines de Stuttgart ou de Munich, mais de Shenzhen, en Chine. Pendant que Tesla, longtemps perçue comme l’icône incontestée de la révolution électrique, encaisse un nouveau coup dur, un acteur jusque-là relativement discret grimpait en flèche : BYD. Les chiffres sont sans appel. Les ventes de Tesla en Europe ont plongé de 40 % en juillet, marquant un septième mois consécutif de déclin. Et pendant que l’Américain recule, le constructeur chinois a non seulement comblé l’écart, mais il a franchi la ligne d’arrivée en premier.
Un recul qui va bien au-delà des simples fluctuations de marché
Ce n’est pas qu’une question de courbes de croissance ou de cycles économiques. Ce recul brutal de Tesla s’inscrit dans un contexte plus large, plus sensible, plus humain. Celui de l’image. Et de la perception. Parce que derrière les chiffres, il y a des gens. Des consommateurs. Des électeurs. Des citoyens. Et beaucoup d’entre eux, en Europe, ne reconnaissent plus l’entreprise qu’ils ont un temps admirée. Ou du moins, ils ne reconnaissent plus celui qui la dirige.
Elon Musk, PDG de Tesla, a vu son influence politique s’étendre bien au-delà des frontières de ses usines. Et ce, au moment même où l’opinion publique européenne devenait de plus en plus vigilante face aux discours jugés extrémistes, provocateurs, voire dangereux. Son soutien ouvert à des partis comme l’AfD en Allemagne ou Vox en Espagne n’est pas passé inaperçu. Bien au contraire. Il a fait tache. Et cette tache, elle s’est étendue jusqu’au showroom.
Des manifestations ont éclaté dans plusieurs grandes villes européennes. À Milan, des effigies de Musk ont été pendues en signe de protestation. À Londres, des affiches le comparent à des figures historiques sombres. Ce n’est pas anodin. C’est un rejet symbolique, presque viscéral. Un rejet qui ne se limite pas aux réseaux sociaux, mais qui se traduit directement dans les comportements d’achat.
Un sondage publié en janvier par Electrifying.com révèle une réalité crue : 60 % des répondants affirment qu’ils seraient moins enclins à acheter une Tesla à cause du comportement de Musk. En Allemagne et au Royaume-Uni, plus de 70 % des personnes interrogées ont une opinion négative du milliardaire. On ne parle plus ici de marketing ou de concurrence technologique. On parle d’éthique. De valeurs. Et d’un fossé croissant entre ce que certains consommateurs attendent d’une marque et ce que leur inspire son dirigeant.
BYD, le challenger silencieux qui profite de la tempête
Alors que Tesla vacille, BYD avance. Pas en criant, pas en faisant du bruit, mais en proposant. En écoutant. En s’adaptant. Le constructeur chinois n’a pas attendu que le marché bascule pour agir. Il s’est préparé. Et il a frappé au bon moment.
En ouvrant des showrooms dans les grandes capitales européennes, en adaptant ses modèles aux goûts locaux, en parlant une langue que les Européens comprennent, celle du prix, de la praticité, de la fiabilité, BYD a su créer une percée là où d’autres n’ont vu qu’un mur. Résultat ? En juillet, 9 698 véhicules BYD ont été immatriculés dans l’UE, contre 6 600 pour Tesla. Une première : le Chinois dépasse l’Américain sur un mois. Une victoire symbolique, mais aussi stratégique.
Et ce n’est pas qu’une question de timing. C’est une question d’offre. Alors que Tesla propose une gamme relativement restreinte, centrée sur quelques modèles phares, BYD couvre un spectre bien plus large. Des petites citadines comme la Dolphin, vendue à partir de 19 990 €, aux SUV familiaux, en passant par des modèles hybrides rechargeables, l’entreprise chinoise touche un public plus diversifié. Un public qui, souvent, cherche une alternative électrique sans se ruiner.
Mais ce n’est pas tout. BYD innove. Et parfois, mieux que ses rivaux. En mars, elle a dévoilé une technologie de recharge révolutionnaire : 400 kilomètres d’autonomie en seulement cinq minutes. Comparé aux 320 km que Tesla parvient à ajouter en 15 minutes, le contraste est frappant. Et là où Tesla fait payer cher ses fonctionnalités d’assistance à la conduite, BYD intègre sa technologie « Œil de Dieu » — un système avancé d’aide à la conduite — sans surcoût sur la majorité de ses modèles. Une stratégie claire : démocratiser l’électrique, pas le transformer en objet de luxe inatteignable.
Le marché européen, entre transition et résistance
Pourtant, il serait trop simple de résumer cette évolution à un simple changement de garde. Le marché des véhicules électriques en Europe continue de croître. Fortement. En juillet, les immatriculations de voitures électriques à batterie ont bondi de 39 % par rapport à l’année précédente. Elles représentent désormais 15,6 % du marché total. Un chiffre en hausse, mais que l’Association des Constructeurs Européens d’Automobiles juge encore insuffisant. « C’est loin, très loin, de là où nous devrions être », a-t-on pu lire dans un récent communiqué. La transition énergétique tarde. Mais elle avance.
Et dans ce mouvement, les marques chinoises gagnent du terrain. Selon JATO Dynamics, elles détiennent désormais 5 % du marché européen au premier semestre 2025 — un record. Un chiffre qui, s’il peut sembler modeste, cache une tendance lourde. Celle d’un basculement progressif, souterrain, mais irréversible.
Tesla, malgré son recul mensuel, reste en tête sur l’année. 77 446 unités vendues contre 58 434 pour BYD sur les sept premiers mois de 2025. Mais les tendances sont inquiétantes pour l’Américain : ses ventes annuelles ont chuté de 43,5 % par rapport à l’année dernière. Celles de BYD, elles, ont explosé : +251 %. Une dynamique inverse, presque polaire.
Alors, que faut-il en conclure ? Que Tesla est finie en Europe ? Non. Mais que son modèle, peut-être, est en train de se fissurer. Que l’image du fondateur, une fois un atout, devient un fardeau. Et que le consommateur européen, de plus en plus exigeant, ne se contente plus d’un produit brillant. Il veut une marque qui incarne des valeurs. Qui respecte ses choix. Qui ne le met pas mal à l’aise quand il entre dans un parking.
Vers une nouvelle ère de l’automobile européenne ?
On pourrait être tenté de voir dans cette bascule un simple effet de mode. Une crise de croissance. Un incident diplomatique médiatisé. Mais ce serait sous-estimer ce qui se joue réellement. Ce n’est pas qu’une question de voitures. C’est une question de confiance. De représentation. De place dans la société.
BYD ne parle pas de révolution. Elle ne promet pas de changer le monde. Elle vend des voitures. Bonnes, fiables, accessibles. Et paradoxalement, c’est peut-être ce réalisme tranquille qui plaît. Parce qu’il rassure. Parce qu’il ne cherche pas à imposer une vision, mais à répondre à un besoin.
Et pendant ce temps, Tesla, qui a longtemps incarné l’audace, le futurisme, l’innovation à tout prix, se retrouve coincée entre ses propres rêves et une réalité qu’elle semble avoir oubliée : celle des gens. Des vrais. Ceux qui achètent une voiture non pas pour suivre un gourou, mais pour aller au travail, emmener les enfants à l’école, ou partir en week-end.
Le marché européen n’a jamais été facile. Il est exigeant, fragmenté, sensible aux détails. Et aujourd’hui, il dit clairement une chose : il n’achète plus seulement une voiture. Il achète une idée. Une promesse. Une posture.
Et pour l’instant, c’est BYD qui semble mieux la comprendre.